Conséquences de la suspension des accords de coopération judiciaire entre le Maroc et la France sur l’application de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981

Session plénière mars 2014 - Question orale de Madame Kalliopi ANGO ELA, Sénatrice représentant les Français établis hors de France

QUESTION

Les tensions diplomatiques entre la France et le Maroc ont conduit ce dernier a décidé de suspendre l’exécution de tous les accords de coopération judiciaire avec la France. Ceci fut annoncé le 26 février dernier par le Ministre de la justice du Royaume du Maroc.

Dès lors, la convention franco-marocaine du 10 août 1981 relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire devrait également être suspendue.

Or, l’article 202-1 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi n°2013-429 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, consacre, dans son alinéa 1, la règle de conflit de loi, antérieurement dégagée par notre jurisprudence, selon laquelle les conditions de fond du mariage sont régies, pour chacun des époux, par « leur loi personnelle au moment de la célébration du mariage ». L’alinéa 2 introduit, quant à lui, une exception à ce principe prévoyant que : « Toutefois, deux personnes de même sexe peuvent contracter mariage lorsque, pour au moins l’une d’elles, soit sa loi personnelle, soit la loi de l’Etat sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet. »

Cette disposition permet ainsi d’écarter la loi personnelle et de célébrer le mariage entre personnes de même sexe dès lors que l’un des futurs époux est Français ou a sa résidence en France.

Or, la Circulaire du 29 mai 2013 (NOR : JUSC1312445C), précise que cette disposition introduite par l’article 202-1 alinéa 2 du Code civil ne peut toutefois s’appliquer pour les ressortissants des pays avec lesquels la France est liée par des conventions bilatérales qui prévoient que la loi applicable aux conditions de fond du mariage est la loi personnelles des intéressés.

Dans cette hypothèse, en raison de la hiérarchie des normes, les accords internationaux ayant une valeur supra législative devront s’appliquer au cas d’un mariage impliquant au moins un ressortissant de l’Etat avec lequel ils ont été conclus.

Tel était le cas du Maroc, avant qu’il ne décide de suspendre l’exécution de tous les accords de coopération judiciaire avec la France.

Du fait de cette suspension, la Convention franco-marocaine du 10 août 1981, ne devrait plus être applicable, et faute d’accord international, l’alinéa 2 de l’article 202-1 du code civil devrait trouver à s’appliquer. Nos officiers de l’état civil devraient ainsi pouvoir valablement célébrer un mariage entre deux personnes du même sexe dont l’un des époux est de nationalité marocaine.

Bien entendu, cela concernerait uniquement la validité de tels mariages, et d’affecterait en rien les modalités relatives à leur reconnaissance par le royaume du Maroc, comme tel est d’ailleurs le cas pour l’ensemble des Etats qui ne reconnaissent pas les mariages entre personnes du même sexe. Par ailleurs, le Maroc figure dans la liste - issue de la Circulaire du 29 mai 2013 précitée- des 80 pays pour lesquels l’officier de l’état civil français doit attirer l’attention des ressortissants sur « les risques qu’ils encourent au regard de certaines législations applicables dans le pays d’origine ».

En outre, le Maroc fait partie des Pays désignés par le Décret 26 octobre 1939, dans lesquels nos postes consulaires peuvent célébrer un mariage entre un ressortissant français et une personne de nationalité étrangère, et ce par dérogation au principe posé par l’article 171-1 du Code civil qui prévoit que les autorités diplomatiques ou consulaires ne peuvent célébrer des mariages qu’entre deux Français. Or, l’article 5f de la convention de Vienne du 24 avril 1963, sur les relations consulaires s’oppose à la célébration par nos postes d’une union franco-marocaine entre personnes de même sexe. En effet, cet article prévoit que les fonctions consulaires consistent à agir en qualité d’officier de l’état civil « pour autant que les lois et règlements de l’Etat de résidence ne s’y opposent pas », et l’ordre juridique interne marocain s’oppose à la célébration de mariage entre personnes de même sexe. Afin de respecter les dispositions de la Convention de Vienne précitée, nos autorités consulaires établies au Maroc ne pourront donc toujours pas célébrer d’union entre personnes de même sexe quelle que soit la nationalité des intéressés.

Néanmoins, le nouvel article 74 du code civil relatif à la possibilité pour les Français établis hors de France de voir leur mariage célébré en France devrait cependant trouver à s’appliquer pour nos compatriotes résidants au Maroc, souhaitant épouser une personne du même sexe de nationalité marocaine.

Cet article permet, en effet, dans cette hypothèse où les autorités consulaires ne seront pas autorisées à célébrer l’union, que le mariage d’un Français établis à l’étranger avec une personne de même sexe puisse être célébré dans la commune de naissance ou de dernière résidence de l’un des époux, ou celle dans laquelle l’un des parents des époux à son domicile ou sa résidence, ou à défaut la commune de son choix.

Dès lors, je souhaite qu’il puisse m’être confirmé que des mariages entre personnes de même sexe dont l’un au moins des époux serait de nationalité marocaine peuvent bien être valablement célébrés par nos officiers de l’état civil, depuis le 26 février dernier, date de suspension par le Maroc de l’exécution de tous les accords de coopération judiciaire avec la France.

REPONSE

En attente de réponse

ORIGINE DE LA REPONSE ATTENDUE : MAE/FAE/SAEJ

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