Inscription de la déchéance de nationalité dans la Constitution

Avis n°3 de la commission des lois, des règlements et des affaires consulaires - Mars 2016

Rapport portant sur l’inscription de la déchéance de nationalité dans la Constitution

Madame Daphna POZNANSKI-BENHAMOU

Exposé des motifs

L’Assemblée des Français de l’étranger a été sollicitée par le groupe « Français du Monde, Écologie, Solidarité » afin de se prononcer sur l’inscription de la déchéance de nationalité dans la Constitution, telle qu’envisagée actuellement dans le projet de révision constitutionnelle. L’intérêt de l’Assemblée des Français de l’étranger sur ce point est tout à fait légitime, vu la possibilité toujours sous-jacente de stigmatisation des Français double-nationaux et multinationaux, dès que l’on évoque la double et la multi-nationalité. La Commission des Lois s’est donc saisie de cette question pour avis, comme le lui permet l’Art.12 de la loi n° 2013-659 du 22 juillet 2013.

Après de longs débats, un premier projet d’avis a été écarté afin de rechercher une mouture plus consensuelle. Ce deuxième projet d’avis regrettait « la possibilité de stigmatisation des Français double-nationaux, voire multinationaux » dans le projet de révision constitutionnelle (Art.2) présenté actuellement. Il demandait que « la déchéance de nationalité, telle qu’elle est envisagée, ne soit pas inscrite dans la Constitution, étant donné que l’arsenal juridique existant [dans le Code Civil] répond déjà aux impératifs d’ordre public ». Cette deuxième mouture a également été repoussée par la Commission des Lois par 9 voix contre 6 pour et 2 abstentions. Il est particulièrement regrettable que ce deuxième projet d’avis ait été retoqué car il reposait sur une réelle cohérence juridique, sans porter atteinte aux opinions des différentes émanations politiques au sein de l’Assemblée des Français de l’étranger.

Une troisième mouture a été proposée qui rappelle, comme la précédente, l’avis de l’Assemblée des Français de l’étranger de mars 2012 soulignant que « le droit de posséder une autre nationalité est une richesse pour la France, pour le développement des liens de notre pays avec d’autres peuples ». Cette mouture réaffirme « son attachement aux dispositions du Code Civil qui condamnent toute discrimination fondée sur la possession, par un ressortissant français, d’une autre nationalité ».

Toutefois, dans ce dernier projet d’avis, la demande principale de non-inscription de la déchéance de la nationalité dans la Constitution n’est pas reprise, au motif qu’une « modification de la Constitution n’entre pas dans les compétences de la Commission des Lois ». De fait, si l’Assemblée des Français de l’étranger n’est pas une Assemblée Constituante et n’a pas vocation à le devenir, on peut néanmoins considérer que l’Assemblée des Français de l’étranger est compétente par auto-saisine sur tout sujet ayant ou pouvant avoir une quelconque incidence sur les Français de l’étranger, vu le nombre important de détenteurs de deux ou plusieurs nationalités parmi eux.

La Commission des Lois a émis un avis positif sur la troisième mouture du projet d’avis.

AVIS

L’Assemblée des Français de l’étranger,

CONSIDÉRANT les débats actuels sur l’inscription de la déchéance de nationalité dans la Constitution

RAPPELLE

Son avis de mars 2012 :

Que le droit de posséder une autre nationalité « est une richesse pour la France, pour le développement des liens de notre pays avec d’autres peuples »

RÉAFFIRME

Son attachement aux dispositions actuelles du code civil qui condamne toutes discriminations fondées sur la possession, par un ressortissant français, d’une autre nationalité.

RésultatsAdopté en commissionAdopté en séance
Unanimité
Nombre de voix « pour » 15 42
Nombre de voix « contre » 1 32
Nombre d’abstensions 1 7