Règlementation bancaire pour justifier des dépôts sur des comptes en France de résidant à l’étranger

Session de mars 2017 - Question orale n°9 de de M. Bruno DELL’AQUILA, conseiller consulaire (Djibouti) et conseiller à l’AFE (Afrique centrale, australe et orientale)

Lors de l’arrivée sur le sol national des personnes en provenance de l’étranger, le service des douanes impose une déclaration des sommes transportées par une personne physique, que ce soit en espèces, en chèques, en titres ou en valeurs, si, et seulement si le montant total est égal ou supérieur à 10.000 €.

Pour un montant inférieur à 10.000€, le système français de surveillance des flux physiques des capitaux n’impose donc pas de déclaration d’origine de ces fonds.

En revanche, pour un résidant français à l’étranger possédant un compte en France, il n’est pas possible de déposer tout ou partie ce cette somme importée légalement sur son compte sans avoir à justifier de la provenance « au premier euro ».

Ce curieux zèle bancaire étant en contradiction avec la règlementation douanière, l’auteur de la question demande :

 l’avis de l’administration concernée

 une modification de la règlementation afin d’imposer aux banques un montant minimum annuel sans justificatif des dépôts en espèces et/ou chèques sur les comptes bancaires en France pour nos compatriotes résidant à l’étranger.

L’auteur de la question s’interroge sur les pratiques bancaires qui consistent à demander à leurs clients résidant à l’étranger de justifier dès le 1er euro de l’origine des fonds déposés, en espèces, sur leur compte bancaire. L’auteur de la question indique que ces pratiques sont contradictoires avec la réglementation douanière qui impose aux personnes entrant sur le territoire français de déclarer les espèces ou valeurs transportées uniquement si elles sont supérieures ou égales à 10.000 euros. Il demande donc que la réglementation soit modifiée afin que l’obligation, pour les français résidant à l’étranger, de justifier de l’origine des fonds déposés en espèce et/ou chèques sur leurs comptes bancaires ne soit imposée que lorsqu’un seuil annuel est dépassé.

Les banques françaises doivent exercer leurs activités en conformité avec la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme qui est distincte de la réglementation douanière. Cette réglementation, qui est issue de directives européennes, impose aux banques un certain nombre d’obligations au titre desquelles figure celle de déclarer à Tracfin, la cellule de renseignement financier française, les sommes ou opérations dont elles savent, soupçonnent ou ont de bonne raison de soupçonner qu’elles proviennent d’une infraction passible d’une peine privative de liberté supérieure à un an, d’une fraude fiscale ou participent au financement du terrorisme (article L.561-15 Code monétaire et financier). L’absence de déclaration à Tracfin signifie, a contrario, que les banques peuvent justifier de l’origine des fonds de leurs clients ou, à tout le moins, être capable d’en exclure l’origine délictuelle ou criminelle. Cette obligation de déclaration est imposée sous peine de sanctions disciplinaires et financières (article L.612-39 Code monétaire et financier).

Afin de pouvoir respecter cette obligation de déclaration à Tracfin ou justifier l’absence de déclaration à Tracfin, les banques sont soumises à des obligations de vigilance et doivent ainsi recueillir des éléments d’informations sur la situation économique et financière de leurs clients et analyser les opérations réalisées par ces derniers au regard de ces informations (articles L.561-5 et L.561-6 Code monétaire et financier). Elles doivent, en outre, porter une attention particulière à certaines opérations qui peuvent être considérées comme potentiellement porteuses de risques élevés de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme (articles L.561-10 et L.561-10-2 Code monétaire et financier). Les opérations en espèces, surtout lorsqu’elles sont de montant élevé, en font notamment partie dans la mesure où ces espèces peuvent avoir une origine délictuelle ou criminelle.

Le fait que le client ait procédé à la déclaration exigée par la réglementation douanière à l’entrée sur le territoire français est donc tout à fait étranger aux obligations de vigilances s’imposant aux banques en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et de financement du terrorisme.

Une modification de la réglementation en la matière relève de l’Union Européenne et conduirait à réviser la directive afférente.

Origine de la réponse : Fédération Bancaire Française