Conditions de versement des prestations familiales dans le cas de parents résidant à l’étranger.

Question écrite de M. Francis NIZET, membre élu de la circonscription électorale de Tokyo

QUESTION

De nombreux parents français résidant à l’étranger, ont des enfants vivant en France pour de nombreuses raisons comme par exemple la poursuite d’études.
Les caisses d’allocations familiales refusent parfois de verser les prestations qui sont dues aux parents du fait de l’existence de ces enfants sous le prétexte que les parents ne résident pas en permanence en France. Quel est le cadre législatif et réglementaire qui définit les conditions de versement de ces prestations dans ce cas précis ?

REPONSE

A titre liminaire, il convient de rappeler que l’une des règles de base de la législation française en matière de prestations familiales est que ces prestations sont soumises à une condition de résidence stable et régulière en France, à la fois des enfants qui ouvrent droit à ces prestations et des personnes qui ont la charge effective de ces enfants : « Toute personne française ou étrangère résidant en France, ayant à sa charge un ou plusieurs enfants résidant en France, bénéficie pour ces enfants des prestations familiales dans les conditions prévues par le présent livre » (article L. 512-1 du code de la sécurité sociale - CSS). En d’autres termes, ces prestations ne peuvent, en application de cette seule législation interne, être « exportées » en faveur de personnes expatriées.

La législation française prévoit toutefois une exception au caractère « non exportable » des prestations familiales : il s’agit du cas des travailleurs qui sont détachés – et donc maintenus à la législation française de sécurité sociale - en application de cette seule législation (article L. 761-2 CSS), c’est-à-dire en dehors du cadre d’une convention ou d’un règlement international. Dans ce cas, un droit aux prestations familiales est ouvert au titre des seuls enfants qui résident en France (article R. 761-6 CSS). L’article R. 761-6 CSS précise toutefois qu’ « en cas de dispersion des enfants, les allocations familiales sont calculées par la caisse d’allocations familiales comme si tous les enfants résidaient en France et versées au prorata du nombre des enfants qui résident effectivement en France ou sont réputés y résider », la condition de résidence des enfants étant appréciée conformément aux dispositions de l’article R. 512-1 CSS. La condition de résidence de la personne qui assume la charge de ces enfants est quant à elle appréciée selon les critères définis à l’article R. 115-6 CSS (et notamment la condition de résider pendant au moins six mois et un jour sur le territoire français au cours de l’année civile).

Au-delà des cas de figure où seule notre législation interne s’applique, un accord international, bilatéral ou multilatéral, peut prévoir la levée des clauses de résidence pour le bénéfice de certaines prestations, dont les prestations familiales, qui deviennent ainsi « exportables ».

Deux cas de figure peuvent être distingués :
1°) la zone Union européenne (UE)-Espace économique européen (EEE)-Suisse, où s’appliquent les règlements de coordination des systèmes de sécurité sociale (règlement n°883/2004, qui a remplacé, depuis le 1er mai 2010 pour les Etats membres de l’UE, le règlement n°1408/71, ce dernier continuant à s’appliquer transitoirement aux ressortissants des Etats de l’EEE et de la Suisse) ;
2°) les Etats hors zone UE-EEE-Suisse avec lesquels la France a conclu des accords bilatéraux de sécurité sociale (la liste complète de ces accords avec, pour chacun d’entre eux, une rubrique spécifique « prestations familiales », est disponible sur le site du Centre des liaisons européennes et internationales de sécurité sociale –Cleiss- : www.cleiss.fr).

1°) Dans le cadre de l’application des règlements européens de coordination, une personne peut ouvrir des droits aux prestations familiales de la législation de sécurité sociale de l’Etat membre à laquelle cette personne est affiliée, quel que soit le lieu de résidence de ses enfants. Ainsi, lorsque les enfants résident sur le territoire d’un Etat membre autre que celui d’affiliation de la personne qui en assume la charge, les prestations familiales de ce dernier Etat seront servies comme si les enfants résidaient sur le même territoire que cette personne : c’est ce que l’on appelle la « levée des clauses de résidence ». Dans le cas de parents ouvrant tous deux des droits aux prestations familiales en vertu de législations nationales différentes, des règles de priorité permettent d’éviter les cumuls de prestations en déterminant l’Etat prioritairement compétent pour servir ces prestations, l’autre Etat pouvant le cas échéant verser un complément différentiel s’il aurait servi des prestations d’un montant supérieur à celles qui sont effectivement versées.
Parmi les règles de priorité, la première qui s’applique est celle de l’Etat compétent au titre de la législation du lieu de travail. Une exception à cette règle du lieu de travail est le détachement de travailleurs qui, exerçant une mission temporaire dans un autre Etat que leur Etat d’origine, restent soumis à la législation de ce dernier pendant la durée de la mission. Dans ce cas, ils ouvrent prioritairement droit aux prestations familiales de l’Etat d’origine, que les enfants accompagnent le travailleur dans l’Etat où l’activité est temporairement exercée, ou bien qu’ils restent dans l’Etat d’origine.

Ainsi, des prestations familiales françaises seront servies si la France est prioritairement compétente en application des règles de coordination précitées, que ce soit au titre de l’exercice d’une activité en France ou d’un détachement dans l’un des Etats de la zone UE-EEE-Suisse.

2°) Dans le cadre des accords bilatéraux conclus par la France avec des Etats hors zone UE-EEE-Suisse, il convient de distinguer deux cas de figure :

a) L’exportation à proprement parler des prestations familiales françaises (telles qu’elles sont prévues par notre législation nationale) :
Parmi les conventions qui prévoient l’exportation de prestations familiales, seule celle avec Monaco prévoit l’exportation de l’ensemble des prestations familiales selon des règles similaires à celles des règlements européens susmentionnés (règle du détachement ou règle selon laquelle les prestations sont servies de façon prioritaire par l’Etat d’emploi de l’allocataire, quel que soit le lieu de résidence des enfants).
Dans les autres conventions prévoyant l’exportation de prestations familiales, seuls les travailleurs détachés ou traités de la même façon par analogie -donc personnes maintenues à la législation française de sécurité sociale- peuvent bénéficier de prestations familiales françaises. Lorsque les enfants accompagnent le travailleur dans l’Etat d’emploi temporaire, seules certaines prestations sont « exportées » : pour la France, il s’agit le plus souvent des allocations familiales et de la prime à la naissance ou à l’adoption de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE).

b) Les prestations familiales conventionnelles versées dans le cadre de certaines conventions par les caisses françaises, directement ou indirectement, à des familles dont un des membres travaille en France et dont les enfants résident dans le pays cocontractant, sur la base de barèmes négociés entre la France et le pays partenaire concerné (ex. : Maroc, Algérie, Tunisie, Turquie).

Dans tous les autres cas de figure, dès lors qu’une personne résidant à l’étranger n’est pas affiliée au système français de sécurité sociale –soit, principalement, au titre d’un détachement-, aucun droit aux prestations familiales ne peut lui être ouvert au titre des enfants qui sont à sa charge, même si ceux-ci résident en France.

ORIGINE DE LA REPONSE : Direction Sécurité Sociale via FAE/SAEJ/CEJ

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