Publié le 06/09/2010

Allocution de M. Bernard Kouchner, Ministre des Affaires étrangères et européennes et Président de l’Assemblée des Français de l’étranger

Allocution de M. Bernard Kouchner, Ministre des Affaires étrangères et (...)

M. Bernard Kouchner a ouvert les travaux de la XIIIe session plénière de l’AFE le 6 septembre 2010 en prononçant un discours à la suite duquel il a répondu aux questions des membres de l’AFE.

Mesdames et Messieurs les Sénateurs, Mesdames et Messieurs, Chers Amis, vous me pardonnerez mon retard quand vous saurez que je me trouvais à l’étage au-dessous avec un homme qui est le défenseur de Madame SAKINEH, qui s’appelle Mohammad MOSTAFAEI, qui est un véritable héros. Il a lui-même défendu des dizaines et des dizaines de personnes, dont je ne sais s’il s’agit de 9 ou 7, étaient condamnées à la lapidation. Il nous a donné les dernières nouvelles, ce qu’il connaissait du sort de Madame SAKINEH et je me suis rendu compte que la pétition lancée par Bernard-Henri LEVY a déjà recueilli ce matin cent mille signatures, ce qui n’est pas rien. Mais, en en parlant, hélas, peut-être de façon un peu écourtée parce que je devais être devant vous, avec les journalistes, on se rend compte que Madame SAKINEH – qui d’après son défenseur, son fils, tous ceux qui connaissent le cas – est tout à fait innocente des deux crimes – tuer son mari, adultère – va devenir une héroïne mondiale, un cas profondément politique. Elle est déjà à la fois une femme que chacun d’entre nous défend et que le monde entier, je l’espère, demain, défendra ; le monde et chacun de nous. Ce Monsieur MOSTAFAEI, qui est un juriste, avocat qui n’a jamais fait de politique – comment cela serait-il possible dans ce pays ? – a défendu selon la loi. C’était une vraie démonstration de l’honneur, du courage et de la noblesse de ce métier. Il est encore là, il reste trois jours en France et il nous a fait l’honneur de nous visiter.

Mesdames et Messieurs les Sénateurs, Mesdames et Messieurs les conseillers, Chers Amis,

C’est vrai qu’il y a quelques jours, j’évoquais dans cette salle – que je m’efforce de transformer une fois par mois en salle de cinéma et cela fonctionne – auprès de nos ambassadeurs, pour cette réunion annuelle, que selon Rudyard KIPLING : « Tout bien considéré, il y a deux sortes de gens dans le monde : ceux qui restent chez eux et les autres ». Les autres, c’est vous !

Vous, comme les Français de l’étranger que vous représentez, faites partie de ceux qui savent prendre leurs risques pour aller au devant du monde, de ceux qui projettent la France hors de ses frontières. Vous en êtes en même temps les porte-parole. Vous relayez leurs attentes, leurs difficultés, les risques qu’ils prennent parfois et à ce titre, vous êtes des interlocuteurs de premier plan. Je dirais, les premiers interlocuteurs, plus encore que les politiques, pour le ministère des Affaires étrangères et européennes et je suis très heureux de pouvoir, pour la quatrième fois depuis mon arrivée au Quai d’Orsay, ouvrir les travaux de votre Assemblée.

Merci à tous.

J’attache la plus grande importance à ce rendez-vous, ce dialogue essentiel pour la conduite de notre action. Je souhaite donc avec vous dresser le bilan et présenter des priorités. Mais, laissez-moi uparavant saluer la mémoire – c’est la coutume – de membres de votre Assemblée qui nous ont quittés cette année. Je souhaite rendre hommage au Commandant Henri-Jean LOUSTAU, dont chacun a pu apprécier le courage, l’engagement et la ténacité. Il a oeuvré sans relâche, pour que les Anciens combattants ayant servi sous nos drapeaux reçoivent tous, quelles que soient leurs origines, le même traitement et la même reconnaissance. Ce n’était que justice, dont acte !

Je souhaite également rendre hommage à mon ami Guy PENNE, qui pendant des décennies, fut de tous les combats des Français de l’étranger à l’étranger et dont l’action a profondément marqué vos travaux, notamment lorsqu’il présida la commission de la Réforme du Conseil supérieur des Français de l’étranger.(Applaudissements). Monsieur Paul CLAVE est décédé également. Je lui rends hommage également. (Applaudissements).

Mesdames et Messieurs, vous êtes les mieux placés pour le savoir, le ministère des Affaires étrangères et européennes se mobilise chaque jour pour chaque conseiller, pour conseiller, accompagner, soutenir, assister la communauté de nos compatriotes à l’étranger. C’est votre légitime exigence et notre préoccupation permanente. Et c’est un défi ! Notre réseau consulaire doit continuellement s’adapter pour prendre en compte les besoins des Français à l’étranger, dont le nombre progresse de façon régulière. Plus de 4 % chaque année, voire davantage dans certaines régions. C’est un beau signe de vitalité et je m’en réjouis. Il doit aussi s’adapter aux moyens budgétaires et humains dont nous disposons, à l’heure où vous le savez, le Gouvernement est engagé dans un effort important et nécessaire, si l’on veut bien tenir compte de l’équilibre du budget et des déficits, nécessaire mouvement de rééquilibrage des comptes publics. C’est à ce double impératif que notre ministère doit répondre, en assurant, j’insiste là-dessus, l’ensemble de nos missions. Ces dernières années, notre réseau consulaire a évolué. Je voudrais d’ailleurs rappeler pour lutter contre certaines idées reçues, que les ouvertures de postes (13 depuis 2004) ont été plus nombreuses que les fermetures (10). Il y a eu également des transformations de postes et bien sûr, il y en aura d’autres en Europe. Le réseau consulaire de notre pays s’est ainsi étendu en s’adaptant aux reconfigurations du monde et aux besoins de nos communautés : ouverture de consulats dans les grands pays émergents, en Chine, à Chengdu, à Shenyang ; en Inde, à Calcutta et dans les zones en sortie de crise (Erbil au Kurdistan, Juba au Soudan), pour n’en citer que quelques-unes. Au regard des comparaisons internationales, notre réseau est celui qui offre la plus grande gamme de services. Nous pouvons en être fiers, je crois. C’est pourquoi nous poursuivons les orientations qui ont été mises en oeuvre jusqu’à présent, pour continuer à le moderniser et à l’adapter au cas par cas, en fonction des besoins.

Quatre exigences sur lesquelles je vais maintenant revenir, guident notre politique en faveur de nos communautés à l’étranger. Assumer la sécurité et répondre à l’urgence et aux crises d’abord. Améliorer la qualité du service de proximité deuxièmement. Troisièmement, assurer notre devoir de solidarité. Quatrièmement, donner aux Français établis hors de France les moyens de se faire entendre. D’abord, nous devons assurer la sécurité et répondre à l’urgence et aux crises. Ces dernières années, attentats, prises d’otage, crises politiques, catastrophes naturelles, nos compatriotes ont payé un lourd tribu à l’instabilité du monde. Autant de circonstances douloureuses pour nos communautés, pour ces Français dont on est sans nouvelle, pour ces journalistes qui paient lourdement la liberté d’exercer leur métier. Nombreux parmi vous sont ceux qui se sont mobilisés à nos côtés, à chaque fois que la situation l’exigeait, pour aider et épauler nos compatriotes et je les en remercie très sincèrement. Et je veux saluer avec admiration l’action du Centre de crise et de son directeur, Serge MOSTURA... applaudissements).... Merci pour lui. … opérationnel 24 heures sur 24. Le Centre de crise a connu cette année une évolution et un développement stratégique décisif sur le plan opérationnel. Il s’est professionnalisé – il le fallait – même si d’ailleurs, je salue les bénévoles, qui souvent, sont à nos côtés. Ils mènent une action de prévention volontariste, notamment avec la mise en place du nouveau site Internet Ariane, qui permet aux voyageurs en partance pour l’étranger, de s’enregistrer, de manière à ce qu’ils soient plus facilement joignables en cas de difficultés. C’est vraiment un grand progrès dont je vous félicite. Et si vous voulez que nous discutions sur le jugement porté sur chacun des pays en crise ou des régions en crise, cela me ferait plaisir. Cela n’est pas facile : on se fait réprimander d’un côté, de l’autre… il faut trouver un juste milieu, qui ne peut être trouvé que vers le plus de danger, pas vers le moins, vous le comprenez. Mais, en même temps, bien sûr, les pays protestent. Je vous donne un exemple, le pays Dogon, fallait-il prévenir parce que nous pensons qu’un jour – et j’espère que nous nous trompons – il ne sera plus aussi facile de faire du tourisme en pays Dogon. Bien évidemment, le Mali, le Burkina Faso, etc., tout le monde a protesté. Je le comprends, c’est très difficile. Mais, en même temps, pour cet arc sahélien, il nous fallait prévenir…

Le Centre de crise a surtout fait preuve de sa capacité de mobilisation et de réactivité sur la campagne de vaccination contre la grippe H1N1, quels que soient les jugements portés dessus. Et nous sommes le seul pays à l’avoir fait ! Après, vous me direz que plein de personnes ne se sont pas fait vacciner. C’est une autre affaire ! Autant que faire se peut, les Français à l’étranger étaient vaccinés. Et puis, il était à ce moment-là très nécessaire que nous assurions la continuité territoriale. Je pense aussi bien sûr à l’opération d’aide humanitaire et consulaire que nous avons menée en janvier/février dernier, la plus importante depuis de nombreuses années, à la suite du terrible séisme qui a frappé Haïti et dans lequel 34 de nos compatriotes sont morts. La mobilisation et la réactivité dont a fait preuve, autour du Centre de crise, l’ensemble des services du ministère, à Paris et à Port au Prince, ont été exemplaires. C’est un grand sujet de satisfaction pour moi, car quand la tragédie frappe, la France est attendue. Elle doit être au rendez-vous. Elle l’a été, en ce qui concerne Haïti et bien d’autres endroits du monde ; merci à tous les agents du ministère.

Permettez-moi également de souligner le travail accompli par le service de l’adoption internationale à cette occasion. Haïti est, vous le savez, le premier pays d’origine des enfants étrangers adoptés en France. C’est dire si le séisme a eu un impact sur les familles qui étaient en cours de procédure d’adoption. Mais, dans le chaos et l’urgence, les risques de dérive dont peuvent être victimes les enfants abandonnés ou en difficultés se sont exacerbés, bien sûr, et la plus grande rigueur s’imposait. La France a choisi d’être cohérente avec ses engagements et avec les recommandations des instances internationales, spécialisées – je pense à l’UNICEF, à toutes les organisations des Nations Unies - en privilégiant toujours le droit de l’enfant. Dans la pratique, cela signifie que nous nous sommes intéressés en urgence à tous les enfants blessés qui nécessitaient des soins et s’agissant des enfants adoptés, nous nous sommes assurés que tous ceux qui arrivaient en France, c’est-à-dire plus de 600 à ce jour, aient été titulaires d’un jugement d’adoption et de l’autorisation des autorités haïtiennes de quitter leur territoire. C’était et c’est encore le gage de sécurité de leur situation juridique, dont leur avenir et celui de leur famille adoptive dépendent. Et nous souhaitons que tout soit fait suivant les conventions internationales. Or, cela n’est pas le cas. Et nous avons fait pression et nous ferons encore pression sur les autorités haïtiennes, pour qu’elles adoptent les conventions internationales.

Deuxième exigence : améliorer la qualité du service de proximité. Cette année, nous avons aussi accompli quelques progrès, d’abord en matière de simplification administrative et d’état civil. Trop nombreux étaient nos concitoyens de l’étranger ou nés à l’étranger, qui manifestaient leur mécontentement, face à la longueur des procédures, au nombre et à la nature des documents qu’ils avaient à fournir, pour justifier de leur nationalité lors de la délivrance ou du renouvellement de leur carte d’identité ou de leur passeport. Nous avons donc décidé, avec mon collègue Brice HORTEFEUX, de donner aux postes consulaires à l’étranger et aux mairies et préfectures en France, des instructions très claires, visant à alléger les procédures et éviter ainsi d’inutiles tracasseries administratives. Dans le même esprit, j’ai souhaité adapter aux contraintes de l’étranger, les démarches exigées de nos compatriotes établis ou séjournant hors de France, pour la remise des passeports biométriques. Ces dernières ont été simplifiées. Il s’agissait de la double comparution en poste. Nous poursuivrons ces efforts de simplification pour tenir compte au mieux des contraintes propres à l’expatriation.

Troisième exigence : ce devoir de solidarité à l’égard de nos communautés à l’étranger. L’aide sociale tout d’abord. La crise n’a pas épargné nos compatriotes à l’étranger. Vous êtes tous à raison – à juste raison – très attachés à l’aide sociale que nous apportons aux plus démunis. Il s’agit d’une préoccupation essentielle, puisque le régime social en vigueur dans l’hexagone ne s’applique pas à l’étranger. Et je me félicite – et je vous félicite, mesdames et messieurs les Sénateurs – que votre détermination ait permis de préserver l’intégralité des crédits de dettes sociales à l’exercice en cours, c’est-à-dire près de 17 millions d’euros. Le contexte budgétaire, je l’ai dit au début de mon intervention, reste très contraint. Vous le savez, mais je me bats pour obtenir les moyens de poursuivre nos efforts dans ce domaine et nous avons des sujets de satisfaction. Je peux vous annoncer aujourd’hui que le projet de loi de Finances pour 2011 qui sera examiné à l’automne par le Parlement, propose de reconduire une enveloppe d’un montant équivalent à celui voté en 2010, c’est-à-dire plus de 16 millions d’euros. Comme je le souhaitais l’an passé, nous avons eu beaucoup plus de crédits que les autres ministères. Bravo, mais cela n’est pas assez. (Applaudissements).

Comme je le souhaitais l’an passé, nous avons mis à profit les progrès de la citoyenneté européenne et du principe de non discrimination en matière d’aide sociale, au bénéfice de nos compatriotes résidant dans les pays de l’Union européenne. Nos postes ont veillé à ce que nos compatriotes puissent y percevoir les prestations versées par les services sociaux de leur pays de résidence. Nous avons toutefois maintenu un dispositif spécifique de soutien, lorsqu’ils rencontrent d’importantes difficultés dans la reconnaissance de leurs droits. Nos services nous présenteront une évaluation de ce mécanisme en mars 2011 ; si bien entendu des ajustements s’avéraient nécessaires, ceux-ci seraient alors étudiés lors de la prochaine commission permanente pour la Protection sociale des Français de l’étranger. Nous avons également engagé une réflexion sur le financement de la troisième catégorie aidée de la Caisse des Français de l’étranger pour nos compatriotes les plus démunis. Nous examinons actuellement avec les ministères du Budget et des Affaires sociales, les pistes envisageables pour permettre à l’État de pérenniser ce financement.... (Applaudissements)..... Cela n’est pas encore fait ! ....(Rires).

Des propositions seront faites dans le cadre du projet de loi de Finances. Un conseil d’administration exceptionnel de la Caisse des Français de l’étranger, sous la présidence du Sénateur CANTEGRIT les examinera mercredi prochain. D’ores et déjà, je vous remercie tous de la contribution que vous pourrez apporter à cette réflexion. Au-delà de notre action dans le domaine social, notre réseau consulaire s’efforce, au quotidien, d’assister au mieux nos compatriotes en difficultés. En témoigne le nombre de rapatriements pris en charge par ce ministère, qui a connu une hausse de l’ordre de 40 % en trois ans. Deuxième sujet : l’aide à la recherche d’emploi. Les résultats obtenus par nos postes diplomatiques et consulaires sont encourageants. Notre dispositif et nos outils évoluent pour mieux fédérer les synergies et démultiplier les actions de placement et de formation professionnelle, en faveur de nos concitoyens. Nos consulats s’appuient davantage sur le réseau des établissements de l’Union des chambres de commerce et d’industrie française à l’étranger et sur le monde associatif. Par ailleurs, le soutien à la formation professionnelle sera renforcé. J’ai obtenu de mon collègue de l’emploi, le passage de 500 000 à 900 000 euros le montant de l’enveloppe annuelle affectée aux formations qualitatives en faveur de nos concitoyens en difficultés.

Venons-en maintenant à la question de l’aide à la scolarité. J’attache, tout comme vous, la plus grande importance à la scolarisation des enfants de nos compatriotes à l’étranger. Nous avons la chance de bénéficier d’un réseau d’établissements parmi les meilleurs du monde. On pourrait dire le meilleur du monde d’ailleurs… Évidemment, ces établissements demeurent une source de rayonnement incomparable pour notre pays et nous en sommes fiers. Le nombre d’élèves français scolarisés dans les établissements du réseau de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger augmente d’ailleurs chaque année et ils sont 100 000 en cette rentrée. Depuis 2007, un effort sans précédent est engagé, s’agissant des aides à la scolarité versées aux familles. Pour la seule année 2010, elles ont fait plus que doubler, passant de 52 à 105 millions d’euros. C’est pas mal ! Et il serait faux de dire que l’État se désengage. Ne le dites pas, s’il vous plaît. Deux facteurs expliquent cet effort. D’une part, le souci de compenser les hausses de frais de scolarité par une augmentation des bourses scolaires versées par l’AEFE aux familles qui en ont le plus besoin. C’est une mesure de justice, bien sûr, nécessaire. D’autre part, la réforme voulue par le Président de la République, visant à la prise en charge de la scolarité, est aujourd’hui effective dans toutes les classes du lycée : terminale, première, seconde. Mais aujourd’hui, il faut accompagner la mise en oeuvre de cette démarche généreuse et pour cela, trouver les moyens de financer l’aide à la scolarité pour les années à venir. C’est un défi immense qui reste à relever et ceci, en dépit de l’augmentation des crédits pour cette période 2011-2013. En concertation avec les ministères intéressés, une réflexion est en cours au sein du ministère des Affaires étrangères et européennes, pour y apporter des réponses en ayant toujours à l’esprit l’intérêt des familles. Je suis ce travail avec la plus grande attention. Le Premier ministre m’a demandé, dans sa lettre plafond, de formuler des propositions élaborées conjointement avec le ministère du Budget. Ce fut une séance difficile, croyez-moi, tant est grande l’ampleur des sommes engagées ou évoquées.

Plusieurs options sont envisagées, je pense par exemple à la progression modulée mais nécessaire, des frais de scolarité ou encore au maintien pour encore quelque temps, de la prise en charge aux seules classes du lycée. Comme vous le savez, la mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale a présenté au printemps dernier, un rapport sur l’impact financier de l’extension de la prise en charge aux classes de collège. Le Président de la République a également confié une mission à deux parlementaires, Mesdames COLOT et JOISSAINS, en leur demandant de faire des propositions destinées à aménager la prise en charge dans le contexte budgétaire contraint que nous connaissons. J’attends les résultats de leurs travaux, qui seront particulièrement utiles et bien sûr, vous en serez immédiatement informés. Naturellement, les débats parlementaires sur le projet de loi de Finances seront l’occasion aussi d’aborder une nouvelle fois ce sujet.

Quatrième exigence : donner aux Français établis hors de France les moyens de se faire entendre. En 2012, les Français établis à l’étranger seront appelés à participer à l’élection présidentielle et, pour la première fois, à l’élection des députés de onze circonscriptions législatives créées à l’étranger. Cette même année, un renouvellement partiel de votre Assemblée doit se tenir dans les zones Europe et Asie. Ce calendrier électoral est particulièrement dense. Il suscite, je le sais, des inquiétudes de certains d’entre vous, qui craignent qu’il ne puisse être pleinement assuré, en raison des contraintes spécifiques à l’organisation des scrutins à l’étranger. Une proposition de loi tendant à prolonger d’un an les mandats des membres élus à l’Assemblée des Français de l’étranger, a été déposée. Saisie pour avis par mes services, votre Assemblée doit débattre, au cours de cette session, de l’opportunité d’un report des élections. Je serai évidemment très attentif à vos plusieurs jours de travail ici. Évidemment, nous avons déjà appelé l’attention du cabinet du Premier ministre sur cette question de l’aménagement du calendrier électoral dont j’ai parlé tout à l’heure, auquel je suis personnellement très favorable. Je favoriserai la bonne organisation des élections nationales en 2012, tout en renforçant la sécurité juridique de l’ensemble des trois scrutins. Il peut être aussi, je crois, un moyen de favoriser la participation électorale, qui, vous le savez mieux que quiconque, demeure un enjeu majeur. Nous travaillons donc depuis plusieurs mois, à cet objectif et y consacrons d’importants moyens humains et financiers. Notamment pour éviter les difficultés qui ont pu se poser lors du scrutin de juin 2009.

Mesdames et Messieurs, comme vous le savez, j’ai engagé une réforme en profondeur de notre diplomatie d’influence. D’ailleurs, si vous ne le saviez pas, je ne serais pas très étonné, parce que la presse est très peu attentive à cette grande réforme, pour des raisons que je pourrais vous expliquer, mais qu’en gros, vous connaissez autant que moi. D’abord, une réforme qui se passe dans la bonne humeur et avec l’accord de tous n’est pas une réforme ! Or, ici, cela fait trente ans qu’on voulait cette réforme, paraît-il. En tout cas, elle n’avait pas été faite. Laissez-moi vous en dire quelques mots. Dans la bataille mondiale des idées, des contenus culturels, des savoirs, la place de notre pays dans les prochaines décennies, dépend de notre capacité à nous positionner aujourd’hui dans cette compétition. Cette compétition dite culturelle au sens le plus large du terme. De la science aux idées politiques, tout ce que vous voulez… Il y va là très clairement de notre rôle politique, de nos intérêts économiques, mais aussi de nos valeurs. La France a inventé ce fameux soft power et nous ne pouvions pas rester inactifs. Il fallait que la France réforme sa politique culturelle et scientifique extérieure, pour la rendre plus efficace, plus visible et la doter plus. C’est le sens de la création par la loi sur l’action extérieure de l’État adoptée le 12 juillet dernier, dont les décrets ne sont pas encore terminés d’être rédigés – j’espère que ce sera le cas dans les jours qui viennent, car je tiens à les signer moi-même -… (Rires). … Donc, votée le 12 juillet et qui sera chargée, avec ce nom « l’Institut français » de promouvoir nos contenus culturels, notre langue, nos idées. Grâce à cet établissement, qui coiffera le réseau de nos 143 centres culturels à l’étranger, joints dans les projets – pas juridiquement, avec les alliances françaises, nous signons à la fin de la semaine, cette convention entre le ministère des Affaires étrangères et européennes et la Fédération des Alliances françaises – donc plus 650, cela fait un réseau culturel qui sera le premier du monde. Bien entendu, cela ne veut pas dire que nous puissions aller plus loin, car on ne nationalise pas un établissement qui connaît des lois adaptées et issues des pays où il travaille. Ce rêve n’était pas possible ! En tout cas, nous signons à la fin de la semaine, ou au début de la suivante et la France disposera, pour sa diplomatie publique, de la marque unique qui lui faisait défaut, à l’heure de la mondialisation. Je suis heureux que Xavier DARCOS ait accepté de prendre la tête de cet établissement, avec deux femmes remarquables, qui l’une, numéro 2, est issue de la Culture ; la troisième, du ministère des Affaires étrangères et européennes. Je vous rappelle que Xavier DARCOS, deux fois Ambassadeur, a été également deux ans Ministre de la coopération dans ce ministère. Je pense que la tutelle unique n’a pas à se plaindre. La loi du 27 juillet a créé aussi deux autres agences : Campus France sera chargée de développer la mobilité internationale des étudiants et l’attractivité de nos universités ; la seconde, France Expertise Internationale aura pour mission de promouvoir l’expertise française à l’étranger et les enjeux sont immenses et décisifs en matière d’expertise. Le marché de l’expertise est considérable, en termes de retombées, pour notre économie, bien entendu, mais pour notre influence aussi. Je vous parle et je me souviens très bien des responsabilités que j’ai exercées, dans le cadre par exemple, des missions des Nations Unies ou des missions internationales. Je vous assure que pour qu’un expert français soit, lorsqu’on en a besoin, pas six mois ou un an après, disponible, c’était une affaire impossible et nous étions toujours ou du moins trop souvent, battus par les pays anglo-saxons ou par l’Allemagne. J’espère qu’avec France Expertise Internationale, ce ne sera plus le cas. Donc, Institut Français, Campus France, France Expertise Internationale, avec ces trois nouveaux établissements, ancrés dans un réseau modernisé et mieux doté – puisque au total, nous aurons 100 millions d’euros supplémentaires – le dispositif français de coopération, déjà doté d’opérateurs efficaces pour l’enseignement français, l’audiovisuel extérieur et l’aide au développement, est désormais complété et pourra répondre aux attentes de nos partenaires et de nos compatriotes.

Voilà, Mesdames et Messieurs, Chers Amis. La diversité de la présence française hors de nos frontières contribue au rayonnement de notre pays, à son influence dans tous les domaines : humanitaires, culturels, économiques, commerciaux ; et dans un monde, ce n’est rien de le dire, en perpétuelle évolution, dans un monde qui exige toujours plus de dynamisme et d’inventivité, les Français de l’étranger constituent un atout extrêmement précieux et une grande chance pour notre pays. Cette chance nous oblige. La France doit être plus que jamais attentive à leur situation. Si nous savons vous écouter, nous pourrons mieux comprendre l’évolution de notre monde et les attentes de nos communautés. N’hésitez pas à nous informer, à nous interroger, à nous bousculer ! Je compte sur vous pour nous aider dans un esprit d’ouverture et d’initiatives, à relever l’ensemble des défis auxquels nous devons faire face et ainsi porter notre dispositif à hauteur des attentes de ceux qui, parmi nous, on fait le choix du risque et de l’audace. Je vous le disais avec Rudyard Kipling, je vous le dis pour mon compte personnel et je vous remercie. (Applaudissements).